Le Fonds d’assurance maladie de l’Estonie est confronté à un déficit, à une augmentation des coûts des soins de santé et à des critiques après que des dépenses somptuaires ont mis en évidence des lacunes en matière de gouvernance. Les experts et les fonctionnaires préconisent des réformes pour améliorer l’efficacité, éviter l’aggravation des inégalités et assurer un financement durable sans trop dépendre des réserves.
La viabilité financière du Fonds d’assurance maladie de l’Estonie a récemment fait l’objet d’un examen approfondi, suite à la démission de son directeur, Rein Laane, après que les médias ont révélé que l’agence avait organisé un événement estival extravagant dans un hôtel de luxe du sud de l’Estonie. Cette controverse survient à un moment où le fonds est déficitaire, alors que le pays est confronté à une forte inflation, à une augmentation des coûts des soins de santé et à une hausse des impôts.
Les experts notent que les problèmes actuels sont anciens. Kaija Kasekamp, consultante auprès de l’Organisation mondiale de la santé, a expliqué que le déficit du fonds était prévu depuis plus d’une décennie, des analyses réalisées dès 2010 avertissant que le modèle de financement, basé sur une diminution de la main-d’œuvre cotisante, n’était pas viable. Selon l’ancien directeur du fonds, Tanel Ross, l’augmentation des coûts est due au vieillissement de la population, qui accroît le fardeau de la maladie, ainsi qu’à la disponibilité croissante de nouveaux traitements, qui exercent tous deux une pression supplémentaire sur les systèmes de financement.
Alors que des améliorations de l’efficacité du Fonds d’assurance maladie sont considérées comme nécessaires, le gouvernement a récemment choisi d’augmenter le ticket modérateur pour réduire le déficit. Mme Kasekamp a mis en garde contre le risque d’aggraver les inégalités en matière de santé, qui sont déjà parmi les plus élevées de l’Union européenne, en reportant davantage de coûts sur les individus, en particulier ceux qui disposent de moins de ressources. Elle a ajouté qu’il était encore possible de réaliser des gains d’efficacité sans limiter ou réduire les services essentiels.
La ministre des affaires sociales et présidente du conseil de surveillance, Karmen Joller, a souligné la nécessité de réformer la manière dont les fonds sont alloués et gérés. Selon elle, le financement des soins de santé et la gestion des ressources – qu’il s’agisse de personnel, d’équipement ou d’examens – doivent devenir plus efficaces. Avant sa rencontre avec le Fonds le 22 août, elle a souligné l’importance d’une planification claire afin de s’assurer que l’argent des contribuables soit affecté à des changements efficaces, plutôt que de simplement combler des lacunes sans réforme structurelle.
Des voix politiques se sont également fait entendre. Tanel Kiik, membre de la commission des affaires sociales, a critiqué l’orientation fiscale générale du gouvernement, estimant que les fonds disponibles devraient être consacrés à la réduction des listes d’attente et à l’amélioration de l’accès aux soins de santé plutôt qu’à des allègements fiscaux pour les riches. Il a soutenu des propositions telles que la prise en charge par l’État des cotisations d’assurance maladie des enfants, comme c’est le cas pour les personnes âgées. Alors que M. Joller a indiqué que le budget de l’année prochaine pourrait devoir être puisé dans la réserve du fonds, M. Kiik a exhorté le gouvernement à trouver de nouvelles sources de revenus au lieu d’épuiser les réserves de manière répétée.
La crédibilité du fonds a été mise à rude épreuve par des questions de transparence, avec des critiques non seulement sur le coût de l’événement estival, initialement annoncé à plus de 100 000 euros, mais aussi sur le déménagement de l’année dernière dans de nouveaux bureaux plus onéreux au centre de Tallinn. Ces controverses soulignent le besoin urgent de réformes pour restaurer la confiance et assurer la viabilité financière à long terme du système de santé estonien.