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Pas de calme après la tempête : il est temps de réorganiser les systèmes nationaux de GFP dans le secteur de la santé - P4H Network

Pas de calme après la tempête : il est temps de réorganiser les systèmes nationaux de GFP dans le secteur de la santé

La crise du COVID-19 a un impact sur toutes les formes d’action gouvernementale, y compris les politiques et les processus relatifs à la gestion des finances publiques (GFP). Dans ce blog, nous présentons notre compréhension commune des enseignements de la GFP découlant de la réponse sanitaire au COVID-19 et offrons des perspectives pour soutenir le développement d’un programme coordonné de réforme de la GFP dans le domaine de la santé, alors que les pays s’apprêtent à sortir de cette crise.Cette contribution est basée sur un examen rapide des processus de GFP des pays, conçu et administré par l’OMS en avril-mai 2020. L’étude a rassemblé et analysé des données provenant de 183 pays sur une variété de sujets relatifs à la GFP, y compris les mesures de dépenses d’urgence, la révision des lois de finances, la formulation de plans de dépenses, les modalités de dépenses et les mécanismes de reporting. Ce travail s’appuie également sur les enseignements tirés d’un nombre croissant de travaux sur la GFP et la santé et d’un certain nombre de projets et d’initiatives coordonnées entrepris au cours de la dernière décennie pour renforcer et adapter les systèmes de GFP dans le secteur de la santé.

Principaux enseignements en matière de gestion des finances publiques tirés de la réponse sanitaire au COVID-19
Le financement de la réponse sanitaire au COVID-19 est un défi pour chaque pays. De nombreux analystes de la gestion des finances publiques s’accordent à dire que la manière dont les budgets publics sont alloués et gérés a été tout aussi importante pour la réponse d’un pays au COVID-19 que le niveau global de financement consacré à l’effort. Les pays ont rencontré un certain nombre de problèmes communs en matière de gestion des finances publiques au cours de la crise actuelle : i) comment reprogrammer les allocations budgétaires ; ii) comment accélérer les dépenses en première ligne ; iii) comment mettre en place des mécanismes d’établissement de rapports pour garantir la transparence et la responsabilité financières. Si les problèmes rencontrés sont communs à tous les pays, la rapidité et l’efficacité de la réponse sanitaire de chaque pays ont été très variables, en raison des faiblesses et des goulets d’étranglement préexistants dans les systèmes de gestion des finances publiques. Nous décrivons ci-dessous certains de ces défis.
Bien que la plupart des systèmes de gestion des finances publiques intègrent des procédures de dépenses exceptionnelles dans leur cadre juridique (par exemple, les politiques de virement et de réaffectation, l’activation de fonds de réserve), certaines caractéristiques de la budgétisation ont empêché la mise en place d’une réponse efficace. Par exemple, dans les pays dotés de budgets rigides, le processus de réaffectation des fonds en faveur des mesures préventives, des tests et des traitements du COVID-19 s’est avéré fastidieux. Les pays dotés de programmes budgétaires bien définis et flexibles dans le domaine de la santé – où les méthodes d’allocation budgétaire permettent une reprogrammation rapide des dépenses – n’ont pas été confrontés à ces défis dans la même mesure. C’est le cas de pays comme la Nouvelle-Zélande, la France et, dans une certaine mesure, l’Afrique du Sud.
La crise du COVID-19 a mis en lumière un autre défi majeur, lié à l’adoption de budgets pour la réponse sanitaire. Le passage d’une réponse menée par le pouvoir exécutif (c’est-à-dire l’adoption de règlements d’urgence pour réorienter les ressources existantes) à une action législative visant à affiner et à adopter de nouvelles lois de finances ou des budgets supplémentaires a été inégal dans les pays examinés. Bien que l’adoption de plans de dépenses soit, du point de vue de la gestion des finances publiques, essentielle pour garantir l’affectation des dépenses et en assurer le suivi, notre examen a montré que seule la moitié des pays touchés par la crise ont adopté de nouveaux plans de dépenses. Plusieurs pays à revenu faible ou intermédiaire (PRFI) ont eu du mal à élaborer et à approuver rapidement des plans de dépenses en raison de faiblesses systémiques dans les processus de préparation et d’approbation du budget. La confusion autour des rôles et des responsabilités en matière de budgétisation de la santé, en particulier dans les contextes décentralisés (par exemple entre le niveau central, le niveau infranational et le niveau des prestataires), a également été une source de retards et a ajouté une complexité inutile qui a empêché une réponse budgétaire agile à la crise.
Dans certains pays où de nouveaux plans de dépenses ont été élaborés et adoptés, les plans ont été formulés de manière à suivre une approche axée sur les résultats. Certains pays ont introduit de nouveaux programmes, sous-programmes ou activités budgétaires et les ont articulés autour de l’objectif politique général consistant à répondre efficacement à la COVID-19. D’autres, comme le Nigeria, ont créé des programmes temporaires en insérant de nouvelles lignes budgétaires dans leurs budgets existants basés sur les intrants. Ces deux approches visaient à rendre l’utilisation des ressources flexible pour la réponse, tout en créant un cadre pour le suivi de la performance des programmes budgétaires nouvellement définis.
Un autre enseignement intéressant en matière de GFP qui ressort de l’étude des expériences nationales pendant l’épidémie est l’utilisation de modalités de dépenses alternatives pour accélérer le déblocage des fonds publics aux niveaux infranationaux et/ou aux agences d’achat (en fonction des dispositions institutionnelles de financement de la santé), et/ou directement aux prestataires de services de santé sur la ligne de front. Les pays ont essayé différentes approches pour trouver un équilibre entre la flexibilité et les exigences de contrôle. Les exemples de l’Australie, de la Belgique, du Ghana, de l’Inde et des Philippines démontrent l’efficacité de ces approches pour acheminer les ressources là où elles sont le plus nécessaires, y compris les autorisations de dépenses accélérées au niveau central, les procédures accélérées pour les transferts fiscaux aux niveaux infranationaux et les paiements anticipés aux prestataires de services de santé en complément des remboursements rétrospectifs.
D’un pays à l’autre, la transparence financière et l’obligation de rendre des comptes ont également été des défis communs. Certains mécanismes d’information ont pu, plus que d’autres, faciliter un suivi intégré et transparent pendant la crise. Par exemple, les ajustements apportés au système intégré de gestion financière (IFMIS) en Italie, au Malawi et au Timor-Oriental semblent avoir été une approche efficace pour garantir un rapport simple et intégré sur les dépenses pour COVID-19. Toutefois, la création de fonds COVID-19 dans une quarantaine de pays à faible revenu pour collecter des ressources externes et, parfois, des dons privés, soulève des questions en matière de transparence et de responsabilité. Un examen rapide des dispositions législatives relatives aux mécanismes d’information pour ces fonds suggère qu’il n’y a pas de garantie de transparence. En outre, la création de fonds ou d’entités distincts pour canaliser les ressources destinées au COVID-19 risque d’accroître la fragmentation financière dans le domaine de la santé, un secteur qui se caractérise déjà souvent par des flux de financement multiples. Lorsque des modalités parallèles d’établissement de rapports pour le COVID-19 sont introduites en dehors des limites des systèmes d’information financière existants, elles sont susceptibles d’ajouter une charge administrative inutile à la ligne de front, sans pour autant garantir l’obligation de rendre des comptes.

Regarder vers l’avenir : le nouvel agenda de la GFP dans le domaine de la santé
Avant la crise du COVID-19, de nombreux pays ont piloté des interventions visant à améliorer l’adaptabilité et la réactivité des systèmes de gestion des finances publiques, mais leur transition n’a souvent été que partiellement achevée. La crise actuelle offre aux pays une occasion historique d’accélérer et d’intensifier les mesures de réforme de la gestion des finances publiques dans le secteur de la santé. Le prix de l’inaction est beaucoup trop élevé – des flux de financement lents, des ressources mal orientées, une utilisation des ressources et des rapports inefficaces coûtent cher à la fois à la santé publique et à l’économie. Sur la base de notre analyse, nous avons élaboré une série de recommandations clés autour de trois actions complémentaires :
1. Redéfinir le rôle du secteur de la santé dans la réforme de la gestion des finances publiques : Les spécialistes du financement de la santé réclament depuis longtemps une plus grande flexibilité pour les dépenses de santé dans les systèmes de GFP, suggérant que les contrôles soient assouplis à des moments critiques du cycle budgétaire afin de donner aux acteurs du secteur de la santé une plus grande autonomie dans l’utilisation des ressources. Si les préoccupations traditionnelles concernant la discipline budgétaire globale et l’efficacité des dépenses sont valables, les systèmes de GFP doivent s’aligner sur les exigences fondamentales de la prestation de services dans les différents secteurs. Dans le domaine de la santé, cette flexibilité est nécessaire pour gérer l’évolution des besoins en matière de services de santé tout au long de l’exercice budgétaire et les défis posés par des contrôles rigides et excessifs basés sur les intrants, qui peuvent conduire à des inefficacités dans la fourniture des services. La crise du COVID-19 nous a appris que ces spécialistes avaient souvent raison. Les pays dotés de mécanismes de dépenses plus souples ont été en mesure de débloquer des fonds plus rapidement en première ligne, créant ainsi un environnement financier favorable à la prestation de soins. La crise a également mis en évidence des faiblesses systémiques dans la préparation du budget, les processus d’approbation et les processus comptables qui sont endémiques dans certains PRFM qui ne disposent toujours pas des fondements de base de la GFP. Pour l’avenir, le débat ne porte plus sur la question de savoir s’il faut renforcer les bases ou rendre les systèmes de GFP plus flexibles ; au contraire, les systèmes de GFP devraient être simultanément renforcés ET rendus plus flexibles, de manière à disposer d’une flexibilité suffisante au moment et à l’endroit où elle est nécessaire et d’un contrôle adéquat de l’utilisation des ressources. L’ajustement des approches en matière de GFP devrait refléter un nouvel équilibre entre conformité, contrôle, flexibilité et responsabilité, afin d’inciter les systèmes nationaux à être plus réactifs et à mieux répondre aux besoins des services de santé. Ces efforts doivent être réalisés dans le cadre d’une approche consolidée, en étroite collaboration avec les spécialistes du secteur de la santé et avec ceux des niveaux infranationaux, afin de garantir que la décentralisation des fonctions de budgétisation et de dépenses de santé vers les entités infranationales ne limite pas le rôle et les responsabilités des prestataires de services de santé.
2. Réduire l’utilisation de systèmes de gestion financière parallèles dans le secteur de la santé. Le secteur de la santé souffre déjà d’une prolifération de mécanismes parallèles de gestion financière pour budgétiser les ressources, et/ou dépenser les fonds alloués et/ou rendre compte des dépenses. En conséquence, les dispositions de financement de la santé dans les PRFM sont souvent un mélange de mécanismes budgétaires et extrabudgétaires qui se chevauchent fréquemment, nécessitant des rapports supplémentaires sans pour autant garantir la responsabilité des dépenses du secteur de la santé. Le trop grand nombre de sources de financement empêche l’établissement de rapports complets sur l’exécution du budget, ce qui nuit à la position de gestionnaire du ministère de la santé et à sa capacité à garantir l’efficacité de l’allocation des ressources. Elle complique également la gestion des ressources au niveau des prestataires, ce qui empêche les gestionnaires de première ligne d’agir efficacement. La réponse à la crise du COVID-19 n’a fait qu’aggraver le problème là où des fonds spéciaux ont été créés, y compris au niveau infranational (par exemple au Kenya et au Népal). Plutôt que de poursuivre le débat entre les réponses budgétaires et les réponses extrabudgétaires, nous pensons qu’il est nécessaire d’explorer de nouveaux moyens d’intégrer progressivement les fonds externes dans les processus et les comptes nationaux de la gestion des finances publiques. Des modèles de risque fiduciaire efficaces peuvent être élaborés avec les homologues nationaux de manière à éviter de compromettre les systèmes de gestion des finances publiques existants et les systèmes d’information financière en cours de développement. De nouvelles approches visant à utiliser les systèmes nationaux et à soutenir efficacement la responsabilisation pourraient inclure : la rationalisation des mécanismes existants d’établissement de rapports financiers (par exemple pour des maladies spécifiques) ; la consolidation des informations sur les performances financières et non financières dans le cadre consolidé d’un secteur de la santé ; la simplification et la convivialité du SIGIF pour les dépenses de santé ; la redéfinition des rôles, des responsabilités et des capacités des prestataires en matière de gestion financière ; et le renforcement des incitations à un suivi financier efficace, même aux niveaux les plus bas du système de santé.
3. Intégrer la GFP dans les futurs dialogues entre les finances et la santé. Historiquement, la GFP a été négligée dans les discussions sur la disponibilité des ressources du secteur de la santé et elle a généralement été négligée par les décideurs politiques du secteur de la santé. Cela s’explique en partie par le fait que les décideurs politiques et les experts de la santé considéraient la GFP comme une réforme distincte, en dehors du financement de la santé et de la prestation de services. Avant la crise du COVID-19, les budgets de santé étaient chroniquement sous-utilisés dans certains pays à faible revenu, notamment en raison de goulets d’étranglement au niveau de l’élaboration du budget et des dépenses, mais cette question n’a pas été systématiquement traitée en tant que priorité. Pendant des décennies, cette situation a entravé l’enveloppe de ressources du secteur et sa capacité à fonctionner efficacement, tout en affaiblissant sa capacité à négocier des allocations budgétaires plus élevées. La crise du COVID-19 a démontré que les mécanismes de gestion des finances publiques ont une influence cruciale sur le niveau des fonds disponibles pour les prestataires et un impact direct sur l’efficacité globale de la réponse sanitaire – s’ils sont bien gérés, les mécanismes de gestion des finances publiques peuvent fournir un financement ciblé rapidement et avec les niveaux nécessaires de responsabilité en matière de dépenses. Alors que les autorités financières et sanitaires entament des discussions sur le budget pour 2021 et au-delà, il est nécessaire d’adopter une approche beaucoup plus intégrée de leur dialogue. La GFP devrait faire partie intégrante des discussions budgétaires et des programmes de réforme dans le domaine de la santé. S’attaquer aux problèmes de formulation et d’exécution du budget dans le domaine de la santé contribuera à accroître l’espace budgétaire pour la santé et à remédier aux inefficacités dans l’utilisation des ressources dans un monde où les revenus sont limités. Plus d’argent sans de meilleurs systèmes de gestion des finances publiques ne permettra pas d’obtenir de meilleurs résultats en matière de santé !

En résumé, la crise COVID-19 a mis en lumière les faiblesses persistantes des systèmes de gestion des finances publiques et les goulets d’étranglement qui entravent l’efficacité des dépenses de santé et la fourniture en temps voulu des services de santé. Cette période unique offre l’occasion d’aborder le clivage traditionnel de la gestion des finances publiques entre flexibilité et contrôle. L’expérience des pays qui ont traversé cette crise a montré qu’il existe des moyens de rendre les dépenses de santé plus souples grâce à une approche plus consolidée, plus sensible au secteur et plus réactive. Nous sommes impatients de travailler au sein de nos organisations respectives, avec des partenaires sectoriels et, surtout, avec des dirigeants nationaux, afin de définir et de mettre en œuvre une nouvelle approche de la gestion des finances publiques dans le secteur de la santé.

Helene Barroy (Organisation mondiale de la santé, Gouvernance et financement des systèmes de santé), Srinivas Gurazada (Groupe de la Banque mondiale, Pratique mondiale de la gouvernance), Moritz Piatti-Fünfkirchen (Groupe de la Banque mondiale, Pratique mondiale de la santé, de la nutrition et de la population) et Joseph Kutzin (Organisation mondiale de la santé, Gouvernance et financement des systèmes de santé).

Nous remercions Federica Margini (consultante de l’OMS) pour son excellent soutien et ses contributions au développement de la base de données PFM COVID-19, ainsi que tous les contributeurs à l’enquête en ligne de l’OMS sur la PFM.

(Crédit photo : John D Sirlin / Shutterstock)